entre les syndicats, à dépasser les clivages, à réduire ces pratiques culturelles
différentes du syndicalisme - que de sa capacité à peser sur le choix des autres
partenaires sociaux. Deux remarques pour terminer l'approche de ces difficultés.
Les conditions socio-économiques différentes (la Lorraine plus sinistrée que les
autres composants de l'espace) renforcent les pratiques protectionnistes, y com¬
pris au sein d'un monde syndical dont l'horizon reste souvent l'usine, la
commune, le bassin ... rarement l'espace transfrontalier. Notons enfin que les
syndicats ont peu réussi à intégrer le seul salarié transfrontalier: le travailleur
frontalier (15.000 Lorrains travaillent en Sarre); le Luxembourg commence à les
attirer. Eux appréhendent cet espace comme espace global de travail et de vie.
Au total, l'expérience initiale du Conseil syndical interrégional Saar-Lor-Lux
visait à accompagner la restructuration d'un espace affecté par la crise écono¬
mique. Elle tentait de favoriser à cette fin l'émergence d'une région transfrontalière
intégrée, qui attirerait l'attention des instances de la Communauté européenne.
Encouragée par la Communauté et soutenue par le FEDER et le FSE, la réflexion
menée par le CSI pourrait, pour les différentes organisations syndicales qui le
composent, marier les impératifs locaux et les intérêts communautaires. Une
initiative régionale servirait ainsi de modèle à une coopération transfrontalière.
La réalisation d'une «Europe en miniature» dans ces marches si souvent dé¬
chirées par le passé fixerait des repères pour la construction européenne.
Mais la construction d'une telle «région européenne» se heurte à de nombreux
obstacles. Les réalités socio-économiques et les intérêts nationaux varient de part
et d'autre des frontières. Les confédérations syndicales doivent également
s'accommoder d'approches culturelles différentes quant à la place des régions et
du syndicalisme dans la sphère socio-politique. C'est ce qui rend le dialogue
syndical difficile dans l'espace transfrontalier. Il n'a cependant pas été vain, car
certains projets évoqués alors ont depuis trouvé concrétisation dans cet espace,
en matière de transport ou de tourisme vert notamment. L'expérience a ensuite
servi de matrice à d'autres CSI (il y en a une quarantaine aujourd'hui). Elle
montre que le positionnement social ne suffit pas seul à lancer une dynamique.
La nécessaire prise de conscience des différentes approches et identités idéo¬
logiques et nationales du syndicalisme aide tout autant à creuser le sillon
commun.
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