devra pas, en principe, être touché aux monuments aux morts. D’autre part il est
difficile de supprimer les monuments érigés à la gloire de certains régiments, d’hom¬
mes d’Etat, voire même de statues symbolisant la patrie allemande s’ils sont comme
la "Germanie" connus universellement".15
Dans la note définitive, qui reprend en grande partie les développements proposés
par Michel François, Emile Laffon, Administrateur général de la Zone, précise les
raisons pour lesquelles ces monuments doivent être supprimés: "Dans le cadre de
l’action entreprise par les Gouvernements d’Occupation, pour extirper l’esprit milita¬
riste ou nazi de l’Allemagne, la suppression des monuments publics qui l’exaltent a
été envisagée. Ces monuments situés généralement sur les grandes artères ou sur les
places publiques ont un effet continu sur la population et sont des symboles autour
desquels se cristallisent les tendances belliqueuses du peuple allemand auquel il
rappelle sans cesse un passé qu’il y aurait à effacer".16
A l’issue des discussions menées à Berlin début 1946, le Comité interallié d’Education
Publique signale qu’il faut, au point de vue des Beaux-Arts: "Protéger de la destruc¬
tion les monuments qui gardent une valeur artistique après que toute signification
militaire ou nazie leur a été enlevée. Plutôt que les créations "artistiques" du régime
nazi, le Comité a en vue les anciennes valeurs artistiques que les nazis avaient trans¬
formées pour glorifier leur cause (c’était le cas de la cathédrale de Brunschwig qui
avait joué le rôle d’une sorte de sanctuaire nazi)".17
Sur le fondement de ces décisions, les architectes français sont donc tenus de recher¬
cher dans leur région tous les monuments, emblèmes et inscriptions "tendant à
conserver et à perpétuer la tradition militaire allemande, à rappeler et le militarisme
et le parti nazi, ou de nature à glorifier les faits de guerre".18
A nouveau, les hommes de terrain ont tendance à assouplir les directives officielles
(qui préconisent la destruction de la Colonne de la Victoire à Berlin,19 de la Walhal-
la près de Ratisbonne, et de la statue d’Arminius dans la forêt de Teutoburg!20) afin
de ne pas réitérer les erreurs psychologiques commises lors de l’occupation de la
France, du type destruction du Poilu de Vincennes. En fin de compte, l’essentiel des
destructions, dont les frais incombent aux administrations allemandes, visent les
15 Michel François (sous-directeur des Beaux-Arts), Note à M. le Préfet Directeur des Affaires
Intérieures et des Cultes, Baden-Baden, 30 novembre 1945, AOFAA AC/RA 696, 3, 1.
16 Emile Laffon, Note aux Délégués Supérieurs, Baden-Baden, 10 décembre 1945, AOFAA
AC/RA 696, 7, 1.
17 Compte-rendu de la Séance extraordinaire du Comité d’Education Publique tenue le 3 avril
1946 au Building de l’Autorité de Contrôle alliée, signé par le Chef de la Section Education
Publique et Beaux-Arts, 6 avril 1946, AOFAA AC/RA 696,1, 1.
18 Bertrand Monnet*, Instructions générales, 20 juin 1946, AOFAA AC/RA 696,6 et compte¬
rendu de mission à Michel François, 13 juin 1946, ibid., AC/RA 1946-50, p. 3.
19 Cf les documents relatifs à la Colonne de la Victoire, AOFAA AC/RA 696, 7, 1.
20 Michel François, Note pour le Directeur de l’Education Publique, 19 septembre 1947,
AOFAA AC 74, 1.
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