re original tout en restant religieux et fort éloigné des styles et partis adoptés dans
l’architecture des églises catholiques".9
Mais ils ne pourront pas se livrer à la démonstration du savoir-faire français en
matière de restauration dont Monnet* avait rêvé, son projet de chantiers-pilotes
menés "selon les méthodes et le goût français"10 s’étant heurté au veto de sa hiérar¬
chie.11 Les débats techniques entre conservateurs allemands et français se poursuiv¬
ront après le départ des Français dans l’enceinte des rencontres professionnelles inter¬
nationales.
La refonte des institutions et de la législation de protection du patrimoine
D’autre part, Monnet* cherche à introduire dans l’ensemble de la zone les institutions
et la législation française régissant la profession d’architecte. Il a en effet observé que
le titre d’architecte n’est pas protégé en Allemagne, où il n’existe selon lui que des
écoles techniques, et que la conception et l’exécution des projets de restauration n’est
pas contrôlée, et propose en conséquence la création, dans chaque province, d’un
Conseil des Bâtiments, dont la compétence incluerait l’enseignement de l’architecture,
les monuments historiques, la reconstruction et l’urbanisme. Les réformes menées par
ces Conseils devront être inspirées par les instructions françaises: "le but recherché est
un courant d’échange et un rayonnement de l’influence française dans un domaine où
notre prestige est considérable."12 Les officiers-architectes s’efforcent dès lors dans
chaque région de mettre sur pied un Ordre des architectes, de promouvoir un en¬
seignement de l’architecture sur le modèle français de l’Ecole des Beaux-Arts, de
réformer la législation sur les monuments historiques, et de créer un corps d’architec¬
tes des monuments historiques.
Face à ces ambitions, les différents services allemands chargés de la protection des
monuments historiques, traditionnellement dispersés et constitués dans leur majorité
d’historiens d’art, montrent une grande résistance à l’instauration d’organismes cen¬
tralisés sur le modèle français. Quant aux propriétaires (personnes privées ou morales
dans le cas des évêchés, paroisses, hôtels de ville...), ils demeurent attachés à l’indé¬
pendance que leur confère leur aisance financière: ne demandant pas d’aide à l’Etat,
ils en refusent toute directive et revendiquent le contrôle des architectes auxquels ils
font appel pour la restauration de leurs édifices.
9 Bertrand Monnet* (N. 7).
10 Ibid.
11 En revanche, Monnet*, soucieux de laisser une trace durable de la présence française,
décide de redoter Notre-Dame de Trêves de vitraux modernes, réalisés en collaboration par
des artistes français et allemands, en partie financés par la France. Ces vitraux, sorte de
testament de Monnet* en Zone Française d’Occupation, seront effectivement réalisés au
début des années 1950, sous la direction du maître-verrier Jacques Le Chevallier.
12 Rapport trimestriel de la sous-direction des Beaux-Arts, 31 juillet 1946, AOFAA, AC/RA
699,3,1.
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