travaux d’urbanisme dont Belle-Isle avait été le promoteur, et sa levée fut prorogée en
1778 pour assurer le financement d’un colossal et coûteux Hôtel du Gouvernement39.
Pour assurer la sécurité de l’espace lorrain, la monarchie mobilisa donc, de 1680 à
1742, des sommes considérables. En 1771 encore, après une inspection minutieuse, le
comte de Muy (1711—1775) chiffre à près de dix millions de l.t. le coût des travaux à
entreprendre à Metz, Thionville, Verdun, Montmédy, Longwy afin d’y achever, en le
modernisant, le programme arrêté en 1728 et y ajoute plus d’un million pour les répa¬
rations à effectuer40. En définitive, seules quelques miettes y furent consacrées de
1775 à 1786, au bénéfice de Metz (267 448 l.t.) et de Sarrelouis qui reçut plus du
double41 42. Au total, quoique grevées de prélèvements connexes dont le produit pouvait
être détourné de son affection première, ces constructions apportèrent aux Evêchés de
l’argent extérieur, y entretinrent longtemps d’actifs chantiers — ceux des fortifications
où se côtoyaient civils et soldats et foule d’autres : carrières, briqueries, fours à chaux,
forges — et y élargirent le marché de la consommation. La construction des casernes
posa d’autres problèmes.
L’èphémère province de la Sarre (1681—1697), plus que le royaume sans doute,
finança celles de Sarrelouis, la ville n’ayant pas alors la moindre ressource. Ailleurs,
afin de « procurer le repos aux peuples », les villes s’en chargèrent, selon des modali¬
tés de plus en plus onéreuses : obtention préalable de « nouveaux octrois » sur des
objets de consommation peu ou non fiscalisés ; affectation, plafonnée et pour une
durée déterminée, du produit d’un impôt particulier précédemment concédé à terme
(et de préférence impopulaire), pour en obtenir plus facilement la prorogation ; em¬
prunts gagés sur l’ensemble des revenus « extraordinaires », voire coupes de bois
exceptionnelles. Sans plan de financement ni devis rigoureux, la municipalité de
Verdun engloutit ainsi, de 1729 à 1738, 340 000 l.t. — l’équivalent de la totalité de
ses revenus durant ces mêmes années — et devint l’otage de ses entrepreneurs et de
leurs créanciers. Echaudée, elle mit six ans à réunir les 140 000 l.t. nécessaires à
l’achèvement de la caserne de cavalerie, tout en traînant dans son « budget », depuis
1740, 15 à 17 000 l.t. — un bon cinquième de ses dépenses — pour l’entretien des lits
militaires26. Avec un investissement immobilier de l’ordre de 200 l.t. par homme ca-
serné, Verdun a payé chèrement ses casernes. On comprend mieux ses réticences à les
multiplier ...
Le Magistrat de Metz procéda avec plus de prudence. Il proposa au roi, en 1725,
d’affecter chaque année à la construction de casernes au moins 40 000 l.t. — le quart
39 BN NAF 2822, P 121—124 (Historique succinct de l’indemnisation). AM Metz BB 66 (déli¬
bération municipale du 2 juin 1736). AD Moselle C 53 (calendrier des versements). La créa¬
tion de l’imposition et sa prorogation furent décidées par les arrêts du Conseil d’Etat des 20
novembre 1736 et 26 juin 1778.
40 AG MR 1000 et 1001. Pour les constructions : Metz (5 223 389 l.t.); Thionville (2 587 088);
Verdun (1 220 000); Montmédy (413 00); Longwy (395 989). Pour les réparations : Verdun
(630 557); Metz (349 483); Thionville (157 094). De plus, Sarrelouis émarge pour 300 392
ht.
41 Lt-Cl Parnajon, Mémoire historique sur la place de Metz (1836), dans L’Austrasie, Metz,
octobre 1921, tableau p. 77—78. AD Moselle 7 J 47/7 (environ 570 000 ht.).
42 Abbé Clouët, ouvr.cité, p. 488 ; AD Moselle C 30 (délibération du 11 mars 1766); BM
Verdun Ms 208 (éléments budgétaires).
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