sées par les conséquences géopolitiques de Ryswick (1698: 564 066 1. t.) ou d’inévita¬
bles reconstructions comme celle du pont-écluse sur la Sarre, en 1777—8, pour
166 387 l.t.35. Ces crédits sont la manne des chaufourniers, des tuiliers assurés de
commandes massives (800 000 briques en 1685, 670 000 en 1690—92), de quelques
dynasties d’entrepreneurs locaux (les Motte d’abord, relayés par les Fiscal), voire de la
ville entière dont les habitants, manouvriers aux trois-quarts, ne subsistent que par la
garnison et les travaux de fortification selon un mémoire de 177536.
Commencée fin 1740, la construction de la place de Bitche coûta, malgré l’interrup¬
tion des travaux de 1746 à 1752, près d’un million de l.t. jusqu’en 1766, selon un
mode de financement original, imaginé par le maréchal de Belle-Isle, gouverneur des
Evêchés et commandant en chef, de surcroît, dans les duchés. Depuis 1737, la monar¬
chie française imposait à ceux-ci le versement annuel de 400 000 l.t., destinées au
paiement des fourrages d’une trentaine d’escadrons qu’elle y mettrait en quartiers
d’hiver. Sur les instances de Belle-Isle, le Secrétariat d’État à la Guerre s’était engagé à
y envoyer un contingent inférieur afin de constituer un fonds annuel de 50 000 l.t.
destiné à la fortification de Bitche et régulièrement utilisé au moins lors de seize
campagnes effectives de travaux. Fille des fourrages lorrains par le jeu d’écritures
comptables, la citadelle de Bitche résulte d’un subtil transfert de crédits interprovincial
dont une bonne partie (468 000 l.t. ) fut versée aux entrepreneurs locaux et à leurs
salariés37.
Les crédits investis à Metz dépassent ce niveau. Estimés à dix millions de l.t., les
travaux en consommèrent tout près de cinq de 1728 à 1741, au rythme de 400 000
l.t. annuelles — soit le double des recettes budgétaires de la ville ou l’équivalent de la
capitation levée sur l’ensemble des Evêchés — durant les années de grande activité
(1728—33 ; 1737—40). Ils entraînent la présence de nombreux bataillons supplé¬
mentaires — dix en 1732, soit théoriquement 6 850 hommes — utilisés aux terras¬
sements et donnent lieu à d’importants marchés, tel celui du 18 novembre 1728 por¬
tant sur la fourniture de 66 800 quartes (3 273 tonnes) de chaux et l’achat, pour
66 983 l.t., du bois nécessaire à leur fabrication38. Il faut y ajouter le montant des
indemnités d’expropriation, versées avec lenteur et définitvement liquidées à
1 767 506 l.t. en octobre 1776. Celles-ci furent à la charge de la généralité deMetz
qui, imposée de 60 000 l.t. par an, en versa 2 340 000 de 1737 à 1776 à ce titre. Le
procédé irrita les Evêchois. Si « Metz défend l’État », n’était-ce pas au royaume tout
entier de contribuer à cette indemnisation? De plus, l’excédent de l’imposition
(572 494 l.t. au total pour 39 années de perception) servit à combler le déficit des
35 AD Moselle 7 J 42 et 43 (Notices historiques sur Sarrelouis); 7 J 47, récapitulatif des dépenses
de 1686 à 1789 et P.V. de réception du pont-écluse.
36 Ibid., 7 J 42 (au fil des contrats, le prix du millier de briques augmente de 114 % de 1680 à
1685) et J 5813 (correspondance — lacunaire — des ingénieurs de Sarrelouis). AM Saarlouis
K 30 II-372/2.
37 AD Moselle C 12/14, Belle-Isle à d’Argenson, 2 septembre 1754 (rappel du principe de finan¬
cement); AM Bitche, registre (non coté) des dépenses et travaux annuels. Ceux-ci furent très
actifs en 1744, 1745 et de 1753 à 1766. Voir Charles et Henri Hiegel, La vocation militaire
de Bitche dans Revue historique de l’Armée, 1973, n° I, pp. 104—115.
38 AG MR 1001, pp. 587 ss ; A1 2687/18 (Etat des troupes pour 1732) et A1 2678/76
et 85 (marchés).
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