gen, de poêles et de taques de cheminées destinées aux édifices militaires8. Ville empri¬
sonnée dans une citadelle hypertrophiée, Sarrelouis se développa lentement, le traité
de Ryswick lui amenant les réfugiés de Hombourg-la-Forteresse et de Mont-Royal,
celui de Paris avec la Lorraine (1718) limitant définitivement sa banlieue à quelques
villages et hameaux9. Aussi, avec une capacité théorique de présence — souvent effec¬
tive — d’environ 3 000 hommes en 1698, de 4121 en 1717 et de l’ordre de 5 à 6 000
hommes pour 1760—1780, l’élément militaire surclassa-t-il longtemps une popula¬
tion civile qui serait passée de 1500—1600 habitants en 1717 (sous-estimation mani¬
feste, à augmenter peut-être d’un millier) à 4073 en 177410. Concrètement, le rapport
militaires/civils fut de 1,5 à un jusqu’en 1763, puis s’inversa dans la proportion de un
à 1,3 mais potentiellement, la garnison pouvait à tout moment reprendre le dessus.
C’est dire son rôle « structurant », comme à Montmédy, Longwy, voire Thionville,
places fortes d’extrême frontière.
Rien de tel à Verdun, bien que Vauban y eût, de 1678 à 1690, renforcé la citadelle
cinquantenaire et domestiqué les bras de la Meuse par d’ingénieux ponts-écluses11.
Fort négligée durant tout le XVIIIe siècle, la place, selon les experts, ne vaut rien du
tout et ne doit pas être abandonnée au point quelle est12. Parallèlement, la construc¬
tion des casernes y fut laborieuse. Edifiée normalement de 1730 à 1734, celle d’infan¬
terie attendit sa jumelle destinée à la cavalerie, pourtant commencée en même temps,
jusqu’en ... 1771. La municipalité argua des inondations catastrophiques de la
Meuse en 1740, 1751, 1764, pour en différer le financement et n’obtempéra que sous
8 AD Moselle 7 J 42. Nous ignorons les dates de construction des casernes mais leur figuration
sur les premiers plans de Sarrelouis est une présomption d’existence, compte-tenu des remar¬
ques critiques de Jacques Toussaert à propos des plans nos 53 (ca. 1688), 55 (1690?), 71, 72
(1693) et 74 (ca. 1695) exposés au Heimatmuseum, dans Saarlouis 1680—1980, Katalog zur
Ausstellung, Saarbrücken, 1980, pp. 48—49 et 56.
9 A savoir Roden, Fraulautern, Ensdorf, Lisdorf, Picard, Beaumarais et l’emplacement de la
Ville de Valdrevange (art. 2 du traité du 21 janvier 1718).
10 Pour la capacité des casernes, BN FR 22210, P 160 (Mémoire de Turgot, intendant des Evê¬
chés, 1699), AM Saarlouis K 30 II — 372/1 (Mémoire ... de 1717) et AG MR 975, P 95 ss.
Les rapports ultérieurs proposent tantôt 5 000 hommes (BN FR 11408, p. 491—497; 1764)
vulgarisés par Expilly, Dictionnaire ..., t. VI, article Sarrelouis (1770) et repris par l’ingé¬
nieur Jacques de Carpilhet, le 19 juillet 1771 (AG MR 1001, p. 817 ss), tantôt 6 000 : AD
Moselle 7 J 47 (copie d’un mémoire de 1775) et AG MR 1042, p. 168 ss (1788), avec même la
possibilité d’en loger 7 à 800 de plus chez l’habitant ... Quant à la population civile, le
mémoire de 1717 indique 260 maisons et 695 « familles payant capitation » qui deviennent
1500—1600 personnes dans AG MR 975, soit un simple doublement de ce dernier nombre.
C’est donner à la maison et au feu sarrelouisiens une contenance exceptionnellement basse. Or
une recension démographique du XIX e siècle (AD Moselle, 7 J 46) fait état de 3098 habitants
pour 1726, conversion vraisemblable des 762 feux du Dénombrement du Département de
Metz de 1728 (AM Metz, HH 192). L’emploi du même coefficient (4) produirait 2 780 habi¬
tants pour 1717. Progression tout-à-fait plausible (quelque 300 personnes) de 1716 à 1727
puisque le bilan naturel a laissé un excédent brut de 600 individus. Pour le dénombrement du
1er novembre 1774, AM Saarlouis K 30 II-9. La ville compte alors 460 maisons, soit un coef¬
ficient d’entassement domiciliaire de 8,85. Appliqué tel quel, abstraction faite d’éventuelles
variations, à celles de 1717, la population aurait été alors de 2301 personnes.
11 Jean-Claude Groussard, Vauban et l’eau dans la défense de Verdun dans Archéologia n° 76,
novembre 1974, p. 34—45 et l’étude d’ensemble de Philippe Truttmann, Fortification,
architecture et urbanisme aux XVIIe et XVIIIe siècles, Thionville, 1976, 78 p., illustré.
12 AG MR 1001, p. 595 (rapport du 30 juin 1771) et BN FR 11408, p. 415 (1764). A l’excep¬
tion de la reconstruction de l’écluse de Saint-Airy (1754), on détruisit même le cavalier de la
citadelle (1745) et une de ses demi-lunes (1763).
201