Full text: L' esprit, acte pur

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l’esprit, acte pur 
devenir. Sans doute, il niait la transcendance platonique, 
affirmait que des formes idéales immanentes dans la matière 
formaient la nature et concevait le monde comme une masse, 
qu’un mouvement éternel anime afin de traduire en acte 
la pensée étemelle. Cependant, pour lui aussi, la pensée 
pose la nature comme son antécédent, comme réa¬ 
lité déjà réalisée, qui comme telle peut être définie et 
idéalisée dans un système de concepts fixes et immuables. 
La science ne fut naturellement pour lui que l’acte de l'in¬ 
telligence : adéquation statique de l’intelligence humaine 
à l’intelligence divine, incarnée dans le monde matériel 
en vertu de la finalité qui gouverne le mouvement. En sorte 
que la nature aristotélicienne, comme celle de Platon, n’est 
pas objet de la science en tant que nature ; et en tant qu'ob¬ 
jet de science elle n’est plus la nature, le mouvement, mais 
exclusivement la forme : concept et système de concepts. 
Le devenir aristotélicien n’est qu’une pure exigence, car 
il n’est pas et ne peut pas être le devenir de la pensée : une 
fois conçu, il n’est plus devenir, et en tant que devenir, 
il ne peut être conçu. 
13. Pourquoi les anciens ne comprirent pas l’histoire. — 
L'antiquité ne comprit pas l'histoire, le progrès, réalité 
qui se réalise grâce à un processus qui n’est pas une vaine 
dispersion d'activité mais une création continuelle de la 
réalité elle-même ou en un mot, son développement. Rien 
de plus naturel du reste que cette incompréhension. La 
philosophie antique, arrêtée au concept de la réalité comme 
présupposé de la pensée, ne pouvait formuler le concept 
de son développement. Non seulement la nature de Platon 
et d’Aristote a derrière elle la perfection de l’être qui de¬ 
vrait se réaliser en elle, mais, selon eux, le penser de 
l’homme présuppose la réalité de son propre idéal ; il 
pourra sans doute y retourner mais en est actuellement 
éloigné. Une lumière y brille à l'origine qui devrait être le 
but des efforts humains : l’âge de l’or, la <jri<rtç (oppo¬ 
sée au vdjxos) des sophistes, des cyniques et des stoïques, 
qui est dans le passé comme le monde idéal, antérieur 
à la vie corporelle, de l’idéalisme platonicien.
	        
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