CHAPITRE XVII
Épilogue et Corollaires
i. Caractéristiques de l’idéalisme. — Au point où nous
sommes parvenus, nous pouvons résumer les traits princi¬
paux de la doctrine esquissée dans les pages précédentes.
L’idéalisme absolu ne peut concevoir l’idée autrement
que comme penser actuel, comme une sorte de conscience
de l’idée, si on veut conserver à l’idée la signification objec¬
tive de terme du penser ou de l’acte intuitif, que Platon a
été le premier à lui attribuer et qu’elle conserve encore,
non seulement dans la pensée courante, mais jusque dans
les présupposés du savoir scientifique. D’autre part, un
idéalisme qui ne serait pas absolu ne saurait être idéa¬
lisme qu’à demi. Or un demi-idéalisme est nécessairement
incohérent, que ce soit l’idéalisme transcendant de Platon
qui laisse hors de l’idée la matière et partant le devenir de
lanature, ou bien l’idéalisme immatériel de Berkeley pour
qui tout est idée, hormis Dieu qui est la réalité, la base sur
laquelle la sensation est l’être lui-même, ou encore l’idéa¬
lisme critique et transcendantal de Kant, où l'idée n’est
plus que l’activité unificatrice d’une multiplicité provenant
d’une autre source, et présuppose un contraire incon¬
naissable, qui est la négation de l’idée elle-même. Une
conception idéaliste tend à concevoir l’absolu lui-même,
le tout, comme idée, et est donc intrinsèquement un idéa¬
lisme absolu. Mais une telle conception ne peut-être abso¬
lue si l’idée ne coïncide pas avec l’acte même par lequel elle
est connue : car — et nous touchons ici à la véritable ori¬
gine des difficultés entre lesquelles se débat le platonisme —
si l’idée n’était pas l’acte même par lequel elle est connue