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l'esprit, acte pur
pas été inventé par les philosophes ; la recherche des
origines de cette croyance est une question dépourvue de
sens commun comme toutes celles qui empirisent des fonc¬
tions ou des attitudes de l’esprit essentielles et par con¬
séquent éternelles.
L’affirmation de l’immortalité de l’âme est inséparable
de l'affirmation de l’âme qui constitue le plus simple, le
plus élémentaire de tous les actes de la pensée, et est
partant inévitable ; acte qui n’est rien moins que le
Moi, affirmation de soi. La difficulté extrême que l’homme
trouve à se rendre compte de l’essence de cette toute
première et vraiment fondamentale réalité, et les concep¬
tions en conséquence toujours insuffisantes dans lesquelles
l’intelligence humaine a dû pendant longtemps se tourmen¬
ter, ont donné lieu à d’innombrables et fort diverses façons
d’entendre le rapport qui relie le Moi à l’objet, l’âme au
corps et à tout ce qui étant spatial ne peut pas n'être
point temporel, sans qu’aucune ait été satisfaisante. Ces
interprétations ont à leur tour donné lieu à différentes
façons, toutes également loin d’être satisfaisantes, de con¬
cevoir, et même de nier, l’immortalité. Et la négation n’est
elle-même qu’une manière d’affirmer la puissance, et par¬
tant la valeur de l'immortalité de l’âme.
6. Ce que signifie Vimmortalité. — Que signifie l’immor¬
talité ? L’âme se pose comme Moi, et n’a, en cette qualité,
nul besoin de doctrines psychologiques et métaphysiques
pour s’affirmer. Toute doctrine, en effet, et même toute
activité de notre vie spirituelle présuppose cette affirma¬
tion. Mais cet être, qui se pose lui-même en s’opposant à
toute réalité, se pose justement comme différent de toute
autre réalité. Par conséquent, si le monde naturel que l’âme
trouve en face d’elle existe, ce monde et l’âme ne peuvent
être une seule et même chose. Or, ce monde formant
une multiplicité, l'âme s’ajoute à celle-ci ; et puisque
cette multiplicité temporelle et spatiale est la nature (où
chaque chose est distincte de l’autre et commence par
n’être pas pour être ensuite, et enfin n’est plus après avoir
été, c’est-à-dire naît et meurt), l’âme elle-même, en