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l’esprit, acte pur
lui-même, n’étant pas quelque chose de fixe, mais une dé¬
termination mobile, toujours vivante et actuelle.
2. Limite de l'espace. — La conclusion est que l'espace
n’existe qu’autant qu’il y a, et qu’il n’y a pas, de limite de
l’espace : ou plus exactement qu’autant que la limite qui dé¬
termine la spatialité peut être déplacée à l’infini. Cette limite
doit exister, mais elle ne peut être définitivement fixée
puisqu’elle n’appartient pas à un objet existant par lui-
même, indépendant dès l'origine de toute autre subs¬
tance ; elle est tout simplement l’attribut de l’objet pro¬
duit par l'acte immanent du sujet, dont la réalité consiste
dans la production et par conséquent dans la limitation
de son propre objet.
3. L'infinité de l’espace, négativité des limites spatiales. —
L'espace est donc fini, sans être toutefois un fini déterminé.
Et cette négativité de toute limite déterminée le limitant,
avec l’impossibilité conséquente de lui attribuer une limite
absolue, lui confère la qualité d’indéfini, qui est une consé¬
quence de l’infinité de l’esprit. Car la négativité de la limite
de l’espace est une caractéristique intrinsèque de la limite,
non parce qu’elle est déjà posée par un acte déjà accom¬
pli, mais parce qu’elle est toujours en train d’être posée
par un acte in fieri : par l’acte qui est toujours un acte, un
acte pur, et qui est en ce cas l’acte même de la limitation.
Si la limite pouvait échapper à l'acte spirituel, elle subsis¬
terait ; mais elle ne peut être fixée, et se déplace parce que
limite signifie limitation : elle n’est concevable que par
son immanence à l’acte de l’esprit. Or ce dernier ne pose pas
de limites une fois pour toutes, car cela impliquerait qu'il
cessât d’agir. Ce qu’il y a d’inaltérablement absolu dans l'acte
entraîne donc l’immanence de la limitation, et partant la
négativité de la limite : poser toujours et en même temps
n’avoir jamais posé la limite.
C’est ainsi que l’espace, pour vaste qu’il soit, est tou¬
jours contenu, dépassé par l’esprit qui peut voir au delà
de ses limites, vers de plus lointaines limites ; et l'espace
n’est déterminé, n’est espace et n’est représentable,
qu’autant qu’il est contenu dans un plus grand espace.