CHAPITRE X
L’Immortalité
i. L’espace indéfini et l’esprit. — Si l'esprit est, comme
nous l’avons dit, le principe de l’espace et le contient, il
n’est pas d’espace qui contienne l’esprit, et il est impossible
d'assigner à l'esprit des limites dans l'espace. Cette réflexion
démontre que l’espace est fini, et fait entrevoir la profonde
signification de l’infinité de l’esprit.
L'espace est indéfini, il n’est pas infini. S’il est vrai
qu’on ne saurait lui assigner de limites, certainement il est
tout aussi vrai qu'il n’est pas la négation de toute limite
et qu’il n’est même concevable que limité. L’espace repré¬
sente en effet la multiplicité positive en tant que posée ;
c’est-à-dire que dans son objectivité il est une donnée.
Or il n’y a pas d’objet indéterminé, parce qu’objet signi¬
fie précisément ce qui a été déterminé par l’esprit. L'es-
pace, avons-nous dit aussi, est, comme tel, antithétique;
et l’anthithèse se distingue de la thèse, non comme quelque
chose qui peut être, mais comme une position déterminée.
Cette détermination positive et effective de l’espace (et de
tout ce qui se pose devant nous comme spatial) en tant que
tel implique la limitation de l’espace : implique qu’il est
précisément un espace déterminé. D’autre part, du fait qu’il
n’est pas posé indépendamment de l’esprit, mais par
l’esprit, et qu’il ne subsiste qu'autant que l'esprit le pose,
l’activité spirituelle est la condition de son existence en
qualité d’activité ne s’épuisant ni s'arrêtant jamais, et
continuant à le poser actuellement sans le poser jamais
définitivement. Car l'espace n’est pas posé dans l’acte
qui le pose, mais est ponendum ; ses limites, comme son être