l’individu en qualité de moi
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plus particulier, et précisément un individu. C’est qu’en
effet si tout est être (ce qui constitue un universel compre¬
nant tout, omnia) l’être n’est pas tout, il n’est exclusive¬
ment que lui-même. En sa qualité d’Être unique, il se
distingue nettement et absolument de toute autre
chose pouvant constituer un objet de pensée du
fait qu'il est l’Être unique. On pourrait en dire tout
autant de la substance, de la cause, de la relation et de
n’importe quel autre objet auquel aurait été attribué
la valeur d’une catégorie. Pour que la catégorie reste telle,
il faut s’abstenir de la regarder en face. Car si nous la consi¬
dérons elle s’individualise, se détermine, devient une sorte de
quid unique, et doit elle-même recevoir la lumière d’un
prédicat auquel elle doit se rapporter. Et, dès lors, elle cesse
d’être une catégorie.
8. Particularité de l’universel. — Ce qui vient d’être
dit de la catégorie, pur universel, peut évidemment se dire
a fortiori de tout universel, qui remplit en cette qualité les
fonctions d’une catégorie. Aucune des idées de Platon,
archétypes suprêmes de toutes les choses naturelles, ne
saurait se concevoir sans être simultanément individualisée.
Car si un cheval (particulier) est le cheval (universel), ce
dernier lui aussi est cheval. Et il est évident que si
nous nous laissons transporter sur les ailes de l’imagination
de Platon que nous admirons dans le Phèdre, jusqu’au ciel
où l’on voit précisément le cheval dont la vue rend pos¬
sible ici-bas celle des chevaux mortels, nous ne le verrons
qu’autant que nous l’affirmerons. Or l’affirmer signifie
en faire le sujet d’un jugement tout comme la première rosse
rencontrée entre les brancards d'un fiacre. Cela tient à ce
que le cheval céleste est lui aussi unique dans son incom¬
municable nature et quant à soi omnimode determinata, mais
qu’il ne saurait être l’objet de n’importe quelle intuition
sans être pris comme terme, et sans être en cette qualité
illuminé par un prédicat qui l’universalise. Aussi dirons-
nous par exemple : « il y a un cheval » ; jugement dans le¬
quel le cheval est l’individu et « il y a » la catégorie.
Pour conclure l’universel a donc tellement besoin de se