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L’ESPRIT; ACTE PUR
tait, contingent) est nécessaire sans liberté, en tant que déjà
posé par l’esprit. Il est le résultat du processus ; résultat
qui est précisément parce que le processus a cessé ;
c’est-à-dire qu’on le conçoit comme cessé, en en fixant
et en en prenant un moment qu’on choisit comme résultat.
La nécessité du futur, objet de la prescience divine, dérive
du fait que le futur même est conçu comme un être ou
comme quelque chose se trouvant en face du penser (or nous
savons déjà que seul l’esprit a le pouvoir de le poser en face
de soi en s’y posant lui-même). Cette nécessité est la néces¬
sité du fait naturel, du destin, de la mort considérée d'une
façon naturaliste qui exclut le miracle de la résurrection,
laquelle est uniquement œuvre, que de l’esprit qui ne peut
l’accomplir qu’alors que la nature lui obéit, ce qui implique
à proprement parler qu’elle cesse d’être nature pour s’iden¬
tifier à l’esprit.
20. La causa sui. — Cependant la nécessité de l’être
coïncide avec la liberté de l’esprit. En effet l’être, dans
l'acte de penser, est l’acte même, qui n’est pas mais se
pose (libre par conséquent) ne présupposant rien
(par conséquent véritablement inconditionné). La liberté
est nécessairement un absolu, ce qui confère à l’in¬
conditionné la qualité d'infini, mais seulement autant que
l’absolu est causa sui (1). Sui, notons-le, suppose le se
le sujet, l’autoconscience ; aussi l’être causé n’est-il pas
un effet, mais une fin, une valeur : en un mot le terme vers
lequel on tendetquel’on conquiert. Aussi cette liberté n’est-
elle pas la négation de la nécessité, à moins que par néces¬
sité l’on entende la nécessité qui est propre de l’objecti¬
vité abstraite de l’être ; elle coïncide au contraire, cette
liberté, avec la nécessité de l’être, qui n’est au fond que
la dialectique de l'esprit elle-même.
(x) L’expression est de Spinosa, mais il ne l’employa que dans le sens que pou¬
vait avoir l’avrè x.tvoüv de Platon (Phèdre 245 c) et l’âauroü êvëoyxj[xa de
Plotin (Enn., t. VI, p. 1-8, 16). Voir l’édition de l’Ethique, publiée par l’auteur,
Bari, Laterza, 1915, p. 295, 296. La susbtancede Spinosa, comme l’idée de Platon,
et le Dieu plotinien sont l'inconditionné abstrait, qui ne peut pas être causa sui,
parce qu’il n’est pas l’esprit mais son contraire. Le sui restant de cette façon
un mot vide de sens.
Platon = l’être qui se meut par lui-même.
Plotin — l’œuvre de soi-mème, l’autogène.