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l’esprit, acte pur
dont le tragique grec pouvait dire : ¡xo'voj yàp aùroo xai Geo;
cTiciu/.erv.i d'flvr^y. ttoisÎv daa ’àv r irExpay^êva.
Car le fait est justement cette absolue identité de l’être
avec lui-même, qui lui ôte jusqu’à la possibilité de se
réfléchir sur lui-même et d’affirmer sa propre identité :
identité naturelle, brute.
3. Prévédibilité des faits naturels. — Cette nécessité
propre du fait constitue le contraire de la liberté, et est
un concept qui apparaît commun à l’empirisme et au con-
tingentisme quand on considère ce que signifient vérita¬
blement les prétendues lois naturelles que l'empirisme
attribue aux événements naturels, en se mettant dans une
contradiction apparente avec ses propres principes, et en
semblant par là se différencier du contingentisme. Le con-
tingentisme conçoit en effet la réalité comme une création
continuelle, c'est-à-dire comme la position de quelque
chose de nouveau, divers de ses antécédents. L’empi¬
risme de la science mécanise, au contraire, la nature en
formulant des lois par lesquelles il croit rendre la nature
connaissable, nie les différences, conçoit le futur comme une
répétition du passé, et en arrive à dire, par la bouche
d’Auguste Comte, que savoir est prévoir. Il est vrai que la
critique à laquelle la gnoséologie scientifique a etc soumise
récemment a nié la valeur objective des lois naturelles
comme concepts de classes de phénomènes, et ce faisant
a profondément ébranlé les fondements de la prévédibilité
du futur. Mais il est également vrai que cette critique
n’empêche pas la science empirique de formuler des lois,
et de prévoir le futur autant qu’il lui est possible de le faire.
Et, comme nous l’avons vu, il est impossible d'accepter
l’interprétation simplement économique de ces processus
logiques, sur lesquels la science insisterait néanmoins.
4. Loi et uniformité naturelle. — La question a été mal
posée par cette critique. La loi ne peut être pensée, et
(1) Agathon, cité par Aristote, Morale à Nicomaque, t. ¡VI, 2 p. 1139, b 19,
Dieu même en ce seul point n’a pas de liberté :
Il faut bien que toujours ce qui fut ait été.
Trad. Barthélemy Saint-Hilaire - Ed. Durand, p. 197.