Les difficultés du dialogue intersyndical
Lorsqu'on est au niveau du dialogue dans et entre les instances syndicales qui
composent le Conseil syndical interrégional, on mesure les difficultés de l'opéra¬
tion. Il en est de même au niveau de l'action; une manifestation organisée par le
CSI à Sarrebruck le 6 avril 1978 peine à mobiliser 1500 personnes, alors qu'au
même moment les manifestations nationales en Lorraine ou en Sarre attirent
souvent sur les mêmes thèmes plus d'une dizaine de milliers de personnes. Bien
davantage, les négociations sont conduites par les délégations nationales, le
CSI réduit à l'absence et aucun des grands plans sociaux élaborés à la fin des
années 70 et au début des années 1980 ne tient compte de l'espace transfronta¬
lier, chaque organisation restant braquée sur la défense de la réalité locale immé¬
diate.16
Nous permettra-t-on de donner quelques exemples des difficultés de ce dialogue
au sem et entre les organisations syndicales? Il est certes extrêmement facile
d'insister sur les divergences d'approches entre les trois organisations syndicales
françaises, non seulement sur les questions intérieures, mais également sur les
perspectives européennes.
Première difficulté, qui traverse, elle, chacun des syndicats français, l'approche
du concept de la région Lorraine. Les confédérations syndicales françaises sont
organisées en Unions départementales et Unions régionales. Si la partie germa¬
nophone (pour simplifier disons le département de la Moselle) a une pratique
transfrontalière réelle, les autres départements lorrains y sont moins sensibles.
Dès lors comment concilier au sein de l'Union régionale d'une confédération les
intérêts des zones intéressées par la coopération transfrontalière avec ceux des
autres composants de l'espace? Comment résoudre cette ambiguïté? Si les états-
majors syndicaux ont du mal à trouver une solution satisfaisante, les militants
par une mobilisation essentiellement centrée sur les intérêts catégoriels apportent
une réponse peu encourageante pour la coopération transfrontalière.
Autre difficulté: l'approche de la régionalisation. Si la structure fédérale de la
RFA a imposé au DGB une approche plus régionalisée, plus décentralisée de la
défense des intérêts des salariés, les syndicats français découvrent la région au
début des années 1970. C'est à ce moment-là - organisation interne - que se
mettent en place les unions régionales. Mais les syndicats français ont du mal à
admettre, à composer avec l'autonomie régionale. A lire leurs réflexions sur la
régionalisation, on s'aperçoit qu'ils sont souvent proches d'une conception qui
est davantage favorable à la déconcentration de services centralisés qu'à une
réelle capacité politique octroyée à la région (à l'exception de la CFDT). Il s'agit
de transposer au niveau européen, ou transfrontalier, les conceptions françaises
de politique régionale (en quelque sorte de «nationaliser» l'approche transfronta¬
lière). Cela reste valable également pour le DGB, qui lorsqu'il évoque la néces¬
16 FO Hebdo, n 1549, 3 mai 1978.
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