d’aucuns le craignent, voir une nouvelle discrimination remplacer l’ancienne,
mais en se basant toujours sur les mêmes principes, à savoir l’appartenance
linguistique et culturelle? Les hispanophones de Catalogne vont-ils être consi¬
dérés comme des citoyens de deuxième zone, des „étrangers“, des „immigrés“
ou au contraire comme des membres à part entière de la Communauté? Il est
tout de même inquiétant qu’à leur sujet, Triadù parle d’„ ... una poblado aliena
castellanoparlant“ ou encore d’„extranys“ et d’„immigrats“ (1990).
Parallèlement à la minorité catalane en Espagne, on a donc une minorité
hispanophone en Catalogne, sur laquelle des pressions d’ordre professionnel
seraient exercées par le biais de la préférence systématiquement accordée aux
„bilingues“ (généralement catalans). Ainsi, on se souviendra que plus de 2.300
professeurs et intellectuels signèrent en 1981 un „Manifiesto por la igualdad de
derechos lingüísticos en Catalunya“ dans lequel ils protestaient contre la
discrimination ... du castillan! (cf. Diario 16, 12 mars 1981).
Il ressort des multiples débats et controverses que le but plus ou moins avoué de
certains est en fait d’évincer le castillan naguère triomphant et omniprésent, de
l’éradiquer, de l’éliminer de la vie catalane et en définitive, de faire du castillan
non seulement une langue seconde, mais une véritable langue „étrangère“.
On peut légitimement se demander si une telle conséquence ultime, non désirée
par tous les Catalans, faut-il le dire, est vraiment dans l’intérêt, bien compris,
de la Catalogne elle-même et si le mieux ne serait pas une sorte de „bilinguisme
équilibré“ ou „tempéré“ tenant compte à la fois des légitimes aspirations de la
majorité des Catalans, mais aussi des droits tout aussi légitimes des minorités et
qui n’oublierait pas une longue et complexe histoire ainsi que les impératifs du
monde moderne, de plus en plus international et cosmopolite.
Badia i Margarit rappelle d’ailleurs fort justement à ce sujet:
„Deseo vehementemente no verme confundido con aquellos cuyos plantea¬
mientos, por desgracia, no siempre presentan el rigor exigible, pues consciente
o inconscientemente se dejan influir por tendencias afectivas y emocionales
derivadas de su condición de catalanes, valencianos, vascos o gallegos.“ (Badia i
Margarit 1987: 8)
La langue unit, mais elle sépare aussi.
Ne vaut-il pas mieux précisément maintenir ce dialogue entre les différentes
langues de l’Espagne, dans un respect mutuel et la reconnaissance de leurs
richesses et rôles divers ? En effet, on pourrait conclure par l’avertissement
suivant contenu dans un éditorial du journal „Le Soir“, de Bruxelles:
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