À la fin du XVe siècle, Metz a assurément perdu de son dynamisme commercial et
de son opulence43, mais n’en continue pas moins à jouer un rôle actif dans le trafic
mosellan. Entre 1474 et 1494, ses bourgeois, marchands et/ou transporteurs, s’adju¬
gent 380 des 1 080 passages consignés dans les six registres du péage sierckois.
Leur participation culmine en 1484 avec 95 mentions (soit 51,4 %). En 1474-75,
ils acquittent à eux seuls 53,2 % du total des droits, et encore une quarantaine de
pour cent en 1481, 1483 et 1484. Leur part chute en 1486 (26 %) et 1494 (22,7
%), mais les impositions ne sont pas, on l’a vu, proportionnelles à la valeur des
articles. Parmi ceux-ci, quelques uns recueillent la prédilection des Messins: bes¬
tiaux (6 161 porcs, 203 chevaux, 55 bovins et 225 ovins en une centaine de taxa¬
tions), céréales (44 taxations et 2 122 mld.), planches (24 taxations et 23 550 uni¬
tés), ardoises (29 taxations), vin (22), peaux (19)44, cabus (17) et laine (16). On
y retrouve des constantes du commerce et de l’artisanat local. L’essentiel du trafic
(céréales, planches et vraisemblablement bestiaux) semble orienté vers l’aval. La
cité a dès lors tout intérêt à entretenir de bonnes relations avec le Luxembourg45.
Les ardoises de la basse Moselle et, dans une moindre mesure, les harengs des
Pays-Bas (5 taxations) constituent des frets de retour.
Trois transporteurs messins, intervenant au cours des six exercices, inscrivent leur
nom au total une cinquantaine de fois (tableau IX)46. Gerhart Mengse vient en tête
avec 57 taxations. Du large éventail des produits déclarés, on retiendra 8 passages
d’ardoises (15 schedel47), 6 de céréales (294 mld.), 5 de vin, de cabus et de laine.
À trois reprises, cet individu passe plus de 10 fois en l’espace de 12 mois. 12 des
52 taxations de Gelman48 portent sur des céréales (509 mld., dont 403 en 1494).
Quant à Mertin, imposé 49 fois, il ne déclare aucun article à plus de 3 reprises,
exception faite des planches (6 taxations). Il effectue 18 passages en 1481, score
équivalent à celui de Gelman en 1484. Émerge également du lot Wormigen, dont
l’activité se confine aux années 1484 et 1486 mais atteint ou dépasse alors la barre
des 10 impositions (23 au total dont 6 pour des ardoises et 5 pour des céréales).
Pour aucun de ces quatre transporteurs, on ne peut parler de spécialisation commer¬
ciale. La conclusion s’imposait déjà à propos des Trévirois Lusschart fort actifs
dans les années 1424 à 1428.
Thionville qui, en termes de passages (152), ravit la deuxième place à Trêves, fait
assez piètre figure à côté de Metz. Ce n’est qu’en 1494 (84 taxations et 30,5 % de
la recette totale) que ses transporteurs occupent le devant de la scène, devançant
même alors les Messins (76 impositions). Jusqu’alors ils effectuaient, bon an mal
43 Ib., passim,
44 En 1492, Hans Crantz, aventurier plus ou moins lié aux Lorrains, tend un piège près de Sierck à une
nef remontant le cours de Trêves à Metz et capture le batelier et un riche pelletier messin
(HUGUENIN, Chroniques, p. 572; STILLER et ANCEL, Thionville, p. 44).
45 Cf. TRIBOUT DE MOREMBERT, Ambassadeurs; ID., Pour la sécurité.
46 Voir aussi tableau VIII: Chronologie des passages des individus imposés au moins dix fois au cours
d’une même année (1481-1494).
47 schedel; charrette à deux roues, ici charretée (Rheinisches Wörterbuch, t. VII, col. 841).
** On peut y ajouter 2 passages de vin en 1477-78 (cf. supra, p. 72, note 23).
77