Full text: Lotharingia

Dès lors cet espace ne pouvait plus se définir par un ou des royaumes, mais seulement par 
des évêchés, des abbayes, des comtés, des fiscs13, comme on le voit clairement dans la 
fameuse description du royaume de Lothaire II dans les Annales de Saint-Bertin lors du par¬ 
tage de Meersen.14 
Dès lors le royaume de Lothaire, dans sa partie nord, pouvait se définir par trois données: 
- La notion la plus simple et la plus fausse était de dire qu'il s'étendait entre la Meuse et le 
Rhin, que la limite orientale du royaume de Charles le Chauve était constituée par l'Es¬ 
caut et la Meuse, puis la Saône et le Rhône, mais cela ne constituait au vrai, à l'ouest 
comme à l'est pour le Rhin, qu'une frontière théorique, celle qu'on cite par commodité 
pour que tout le monde s'y retrouve, mais qui ne correspond en rien à la réalité sur le ter¬ 
rain. On aurait pu dire alors qu'on retrouvait l'antique Austrasie, mais il manque tout de 
même une grosse partie, la partie champenoise, très riche en biens royaux. 
- La notion la plus exacte consiste à énumérer les diocèses, dont les territoires étaient lar¬ 
gement étalés des deux côtés des fleuves: Toul avançait jusqu'à la Marne, Verdun jusqu'à 
l'Argonne, Strasbourg débordait le Rhin vers l'est, Spire et Worms avec Mayence occu¬ 
paient une bonne partie de la rive gauche du Rhin ; quant à Trêves et Cologne, leurs dio¬ 
cèses se prolongeaient loin vers l'est au-delà du Rhin, dans une terre que revendiquait 
Louis le Germanique. Seul l'Escaut jouait un véritable rôle de frontière entre les diocèses 
de Tournai et de Cambrai. Mais faut-il rappeler que le diocèse de Cambrai était uni à 
celui d'Arras? 
La non-coincidence des deux limites, celle des fleuves et celle des diocèses, ne simplifie 
pas l'explication des comportements politiques des uns et des autres. Et faut-il rappeler 
encore que trois comtés du diocèse de Reims étaient intégrés à la Lotharingie15, que le 
Bassigny prolongé par le comté de l'Aube formait une hernie au sud. Le Rhin apparaissait 
comme frontière véritable, la Meuse non. Mais le Rhin était franchissable: dès que cela 
put se faire, l'Alsace alémanique rejoignit le giron des duchés de la Francie orientale, et 
la Lotharingie se trouva dès lors bordée à l'est par le massif vosgien.16 
- la dernière notion qui allait se révéler capitale pour la suite de son histoire était que cette 
région était un pays de contact entre deux pays de civilisation différente, celui de langue 
germanique et celui de langue romane.17 Si le phénomène n'était pas encore très sensible 
en 843 (mais on en avait pris conscience avec les serments de Strasbourg), il allait deve¬ 
nir plus évident avec le temps.18 
13 Ce sont les propres termes de Nithard (ibidem): omnes episcopatus, abbatias, comitatus, fiscos et omnia 
infra praedictos fines consistentia cum omnibus ad se pertinentibus. 
14 Quellen, (cf. note 6) zweiter Teil, p. 208 et suiv. 
15 II s'agit des comtés de Doulcon (Dormois), Mouzon, Castricius. 
16 Voir dans ce volume la communication de Thomas ZOTZ. 
1 7 Voir dans ce volume la communication de Wolfgang HAUBRICHS. 
18 Theodor MAYER, Der Vertrag von Verdun, dans: Der Vertrag von Verdun. 843. Neun Aufsätze zur 
Begründung der europäischen Völker- und Staatenwelt, Leipzig, 1943, p. 15. 
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