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l'esprit, acte pur
moyen de notre propre imagination, et qu'elle a été créée
par notre penser (i) : la ligne droite n'est pas dans la nature,
nous la concevons grâce à notre imagination, non pas immé¬
diatement, mais en la construisant.
Vico pourra ainsi affirmer dans la Scienza nuova (1725),
que l’intelligence humaine est à même de connaître la loi
de l'éternel processus historique, c'est-à-dire du dévelop¬
pement de l'esprit, parce que c’est en elle que se trouvent
la cause première et l’origine de tous les événements
historiques.
8. L’esprit en tant que développement concret. — Le plus
grand effort dont soit capable l’homme pour pénétrer
le processus de la nature est, toujours selon Vico, Y ex¬
périence dans laquelle il dispose les causes pour obte¬
nir les effets. Même alors, le principe actif et efficient reste
pourtant le privilège de la nature, dont les forces agiront
sans doute au service de l’homme, mais sans qu’il en
puisse connaître le modus operandi. Et notre connais¬
sance se bornant, même dans l’expérience organisée,
à la simple constatation des rapports et connexions
existants entre les faits, nous devons admettre que la
mystérieuse activité du réel, qui cependant devrait être le
véritable objet de notre connaissance, nous échappe.
Opération extrinsèque à la nature, notre expérience ne
nous fournit qu’une connaissance superficielle ; ce carac¬
tère superficiel ou ce défaut de vérité est surtout mani¬
feste quand nous comparons la science de la nature aux
sciences mathématiques ou, mieux encore, à la science
du monde humain que Vico appelait le monde des nations.
Les réalités, objet des études mathématiques (nombres et
grandeurs) sont construites par nous, mais ne sont pas une
véritable et propre réalité ; ce sont plutôt des entités
fictives, des suppositions, ou de simples postulats, tandis
que l’histoire est une réalité aussi vraie qu'effective ; et
lorsque nous l’avons comprise, lui conférant une absolue
réalité, il ne reste rien, en dehors de la réalité que nous
(1) Penser est constamment employé pour indiquer l’acte de penser et pen¬
sée pour indiquer le contenu ou le résultat de ce même acte.