Full text: L' esprit, acte pur

ÉPILOGUE ET COROLLAIRES 
23I 
elle partait de l'abstrait pour aller au concret, alors qu’il 
n’y a pas de passage de l’abstrait au concret. Le concret 
est pour le philosophe sa propre philosophie, son penser 
dans l’acte de sa réalisation, par rapport auquel la logique 
de la réalité qui gouverne le penser est certainement une 
abstraction, de même que la nature où la logique doit ser¬ 
vir de base à l’histoire de la pensée. Au contraire, il y a 
un passage du concret à l’abstrait, qui n’est autre chose que 
le processus éternel d’idéalisation de soi. Qu’est-ce en effet 
que l’acte du penser, le Moi, sinon la conscience de soi, réa¬ 
lité qui se réalise en s’idéalisant ? Et qu’est cette idéalisa¬ 
tion du réel, qui précisément se réalise quand il s’idéalise, 
sinon la dualisation par laquelle l’acte du penser se balance 
entre deux Soi, le premier desquels est sujet, et l’autre 
objet, uniquement grâce au ré fléchissement de l’un dans 
l'autre au moyen de l’acte concret et absolu du penser ? 
Cette dualisation implique d’ailleurs une différenciation 
intime du réel qui, en s’idéalisant, se distingue de soi- 
même (car il distingue le soi-sujet du soi-objet) et se con¬ 
naît du fait même qu’il se retrouve en face d’un soi diffé¬ 
rent dans son idéalité. Et la différence est en effet radicale : 
elle est la négation de la réalité qui s’idéalise. Car le soi- 
sujet est le penser, tandis que le soi-objet est la pensée, 
l'opposé du penser. 
Le penser est activité, et la pensée est le produit de cette 
activité ; l’activité est, comme telle, causa sui, et par con¬ 
séquent liberté : la pensée est un simple effet qui a hors 
de soi le principe de son être, et est donc mécanisme. L’acti¬ 
vité devient, l’effet est. L’effet est comme non-soi, terme 
d’un rapport entre le soi et le non-soi, et c’est là que 
gît sa mécanicité. Il est donc une unité dans une pluralité, 
et son concept implique déjà la multiplicité, le nombre. 
Par contre, l’activité se réalise dans le non-soi, ou plutôt 
se réalise en soi comme non-soi ; elle n’est donc un rapport 
qu’avec soi-même : unité absolue, infinie, sans multiplicité. 
La multiplicité de la pensée implique l’exclusion réci¬ 
proque des éléments de la multiplicité, et, par conséquent, 
l’espace. La pensée est en somme la nature. Elle est la 
nature, parce qu’elle est l’idée dans laquelle la réalité s’est
	        
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