LA SCIENCE, LA VIE ET LA PHILOSOPHIE 215
non à l'acte même du penser où gît pourtant la réalité concrète
de l’idée ; avec la seconde, on pense à l’idée, non en tant que
contenu ou objet du penser, mais en tant qu’acte réalisa¬
teur d'une réalité spirituelle. Un acte n’est jamais autre
chose, bien entendu : mais il faut observer que lorsque nous
comparons deux ou plusieurs actes, nous ne sommes pas
dans l’actualité de l’esprit où la multiplicité est unité. Car,
dans cette actualité, la comparaison est impossible, et
quand un acte est une action que l'on oppose à une idée,
l’idée n’est pas un acte spirituel, mais un simple terme idéal
de l’esprit, qui y pense : objet et non sujet. De même, lorsque
nous considérons théoriquement une action déjà accomplie,
Faction n’est plus un acte du sujet, mais un simple objet
que l’esprit dans son actualité considère, le résolvant ainsi
dans l’acte présent de la conscience que l’esprit a de cette
action : conscience qui est précisément alors sa véritable
action.
12. Conclusion. — Ce qui, en qualité de vie de l’esprit,
constitue l’objet de la philosophie est bien, au point de vue
abstrait, une chose distincte de la philosophie, mais vit néan¬
moins comme philosophie. Et lorsque cet objet se pose en
qualité de réalité déjà vécue, devant la conscience, celle-ci
en résout la réalité dans la connaissance où elle la résume,
pour la conserver ensuite comme philosophie.
Aussi la philosophie est-elle vraiment la substance im¬
manente de toute vie spirituelle. Et, puisqu’une histoire de
la philosophie qui retarderait sur la philosophie est incon¬
cevable, il est évident que le concept de l’identité de l’une
avec l'autre et de l’éternelle résolution de l’une dans l’autre
contient la plus complète, la plus parfaite confirmation
de l’absolu de la réalité spirituelle, qui ne peut être conçue
comme limitée à un moment donné par des conditions qui
la précèdent ou la déterminent de quelque façon que ce
soit. C’est ce concept qui offre, si nous ne nous abusons,
la démonstration la plus solide et l’explication la plus
évidente du concept de la liberté de l’esprit (1).
(1) Sur l’identité de la connaissance et de la volonté voir l’ouvrage de G. Gentile,
Sommario di Pedagogia, ir# partie, chap. xiv, et 2e partie, chapitre premier.