PREVISION ET LIBERTÉ
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2i. Objection. — Cettte dialectique, en résolvant dans sa
piopre unité toute multiplicité, par suite toute condition,
en se posant comme le principe de toute synthèse de con¬
dition et conditionné, vient à éliminer aussi du conoept de
l'esprit cette catégorie de la conditionnalité, dont nous avons
si longuement parlé, et de la sorte confirme encore l’unité
infinie de l’esprit. C’est qu’en effet à travers la critique de
la catégorie de la condition nous avons acquis le véritable
concept de la liberté. Comme, du reste, à travers la cri¬
tique de l’individualité nous avons découvert le concept
de l’individualisation et à travers la critique de l’espace
et du temps le concept de l’infinité de l’esprit en oppo¬
sition .-à la nature indéfinie, avec celui de l’éternité et de la
véritable immortalité de l’esprit.
Toutefois ce concept de liberté, le nôtre, ne saurait
laisser satisfaits ni les métaphysiciens ni les empi¬
ristes. Fermes dans leur fausse façon de voir et fidèles au
concept d’une réalité présupposée au sujet qui est la consé¬
quence de cette façon de voir, ils croiront que nous n'avons
réussi à établir qu’un rapport gnoséologique par la syn¬
thèse à priori de la condition et du conditionné dans la
dialectique de l’esprit qui se pose comme sujet relative¬
ment à un objet, c’est-à-dire comme unité de la condition
et du conditionné. Ils ne verront dans le résultat de cette
partie de notre étude que l’établissement d’un rapport
gnoséologique au delà duquel le rapport métaphysique
ou réel subsistera toujours, et continuera à être le point
vers lequel tendront le métaphysicien avec son concept
de causalité, et l’empiriste qui voit en l'esprit le conditionné
d’une nature en soi. Admettons, diront-ils, que l’acti¬
vité gnoséologique du sujet se pose en même temps que
son objet dans l’acte de la connaissance, comme condi¬
tion inconditionnée du phénomène : ceci ne signifie nulle¬
ment qu’il soit rèaliter inconditionné, c’est-à-dire qu’il soit
rêaliter condition de tout objet pensable ! L’esprit ne sera
dialectique que sur la base de la condition à laquelle il est
lié réellement.
GENTILE
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