CHAPITRE XII
Prévision et Liberté
1. Le contingentisme et D. Hume. — Le contingentisme
n’a pas surmonté la position de David Hume, qui était
parvenu à la négation de la valeur objective de la causalité
en accentuant la différence entre la cause et l’effet, entre
la condition et le conditionné, et en mettant ainsi en évi¬
dence la singularité de chaque fait.
Or la position de Hume, qui est celle à laquelle la science
de la nature s’est arrêtée comme elle devait inévitablement
le faire, est la position de l’empirisme le plus net. Cet em¬
pirisme, nous l'avons déjà dit, voit dans la réalité un
antécédent de l’expérience immédiate et la considère
comme étant par essence une multiplicité, unifiée, au point
de vue noménique dans les rapports représentatifs que
s’en forme le sujet par une élaboration quelconque de
l’expérience.
2. Le contingent comme fait nécessaire. — La réalité,
antécédent de l’expérience immédiate, est le fait que l'em¬
pirisme se targue de ne point dépasser. Le fait est préci¬
sément, dans sa position absolue et insupérable, la néces¬
sité absolue que le contingentisme croit pouvoir écarter
instantanément en se mettant au même point de vue que
la science, et qui en demeure au contraire le postulat fon¬
damental. La nature — ce monde de l’expérience — est un
fait, qu’elle soit prise dans son ensemble ou dans chacun de
ses éléments : un fait qui, étant déjà effectué, est indisso¬
lublement lié à la loi de fer du passé, infectum fieri nequit, et
GÏNTILE
II